Calendrier de l'Avent 17 #14 : 3000 façons de dire je t'aime de Marie-Aude Murail

Quatorzième jour, quatorzième livre, quatorzième chronique : l'amour du théâtre.

     Chloé, Bastien et Neville ont connu une professeure de français en cinquième qui leur a fait découvrir le théâtre, le jeu et la vie d'acteur. Quelques années après, ils ont chacun fait leur chemin mais n'ont pas oublié leur plaisir de jouer. Ils se retrouvent lors d'une audition pour entrer dans une formation.

     Entre Bastien qui mise sur son humour et qui croit que regarder une vidéo de Louis de Funès suffit à savoir jouer Harpagon, n'aime pas apprendre ; et Neville, un jeune premier mélodramatique très beau mais cleptomane, sur qui tous les espoirs sont fondés, avec une mémoire incroyable mais des émotions puissance mille qui le bloquent ; et Chloé, belle, intelligente, qui suit la formation en parallèle de sa prépa, des parents qui la poussent à l'excellence, coincée, ou du moins qui ne se libère pas assez pour devenir quelqu'un d'autre.

Un trio uni par l'amour du théâtre, et ce jusqu'au bout. Une fin qui sera à l'image de ces personnages. Une fin très juste.

     Ce qui est fantastique dans ce roman, en plus de tout le reste, c'est le narrateur. Il alterne la première personne avec la troisième, à tel point qu'il peut être n'importe qui. Exemple : "Nous étions trois collégiens de cinquième et nous venions d'horizons si différents que rien ne nous destinait à nous dire un jour je t'aime.

Chloé avait pour parents M et Mme Lacastaire [...]

Bastien était le fils de Vion [...]

Neville se serait appelé Steevy si la voisine [...]"

     "Nous sommes" comme si l'un des personnages parlait, mais lequel, puisque tous sont cités comme s'ils n'étaient pas le narrateur. Brillant. Puisque le narrateur est tout le monde et personne en même temps. Et c'est ainsi tout du long. Lorsque nous sommes dans l'action, dans ce que font ces trois personnages, le narrateur semble extérieur et utilise la troisième personne. Mais quand on s'éloigne et que cela devient plus du souvenir, on revient à la première personne.

Pourquoi 3000 façons de dire je t'aime ? Une large question. Peut-être parce qu'il existe plusieurs amours dans ce livre : l'amour filial, l'amour parental, l'amour fraternel... le trio qui s'aime de différentes manières ; Bastien aime Chloé, Neville aime Bastien, mais aussi Chloé à sa manière, qui aime les deux garçons de différentes manières... ou encore Jeansen, leur professeur, qui aime Neville comme un fils, mais également comme un artiste.

Et il y a sans doute différentes manières de ressentir l'amour, et donc de le dire.

Un livre très bien écrit, des personnages forts et intéressants. La magie du théâtre est là, à travers les scènes qu'ils jouent, mais aussi leur vie, car le théâtre est tellement présent que c'est comme s'ils jouaient un rôle même dans leur vie de tous les jours.

Une belle découverte et une bonne qualité. A découvrir.

Marion