Le grand vizir de la nuit de Catherine Hermary-Vieille (2018) SP

Publié le par Marion L.

Le grand vizir de la nuit de Catherine Hermary-Vieille (2018) SP

Il fait parti de ces livres qui une fois refermés ne nous quittent pas, après lesquels il faut un temps pour revenir dans la réalité, quitter la magie d'un instant. Un grand merci aux éditions de l'archipel pour ce livre.

     Ahmed sait que la mort est proche. Alors pendant dix soirs, à Bagdad, sur la Grand-place des artisans, il raconte. Il partage une dernière fois son histoire. Celle des vizirs Barmazides. Celle de Djafar al-Barmaki, dont il était le serviteur. L'histoire des jours fastes de Bagdad.

Il raconte la beauté de Djafar, son amour pour lui, l'amour du Calife Haroun al-Rachid lui-même, et d'une princesse, un amour qui causera sa mort.

     Dès les premières pages nous savons que cette histoire ne finira pas bien puisque Ahmed regarde la tête de son maître, sur un pont, au bout d'une pique. Mais comment en est-on arrivé là ? Qu'a pu faire Djafar pour subir ce sort malgré l'amour fou que lui portait le Calife ? Et même en le sachant, nous sommes touchés. Ahmed a tellement divinisé son amour qu'il paraissait intouchable jusqu'au bout. Un sentiment renforcé par le fait que l'amour que tous lui portaient était si fort que sa mort ne peut pas ne pas avoir de conséquence.

     Impossible de ne pas penser aux Mille et une nuits. Surtout qu'Ahmed raconte, il transmet par voie orale. Cet aspect a été très bien rendu par l'auteure. Nous aussi nous sommes à Bagdad, parmi la foule, à écouter chaque soir cet homme. L'écrit n'est pas vraiment là.

Un récit qui nous fait traverser l'espace et le temps, nous plonger dans un univers parallèle le temps d'une lecture.

     Je n'avais encore jamais lu de texte de Catherine Hermary-Vieille. Une auteure qui m'a charmée avec ses mots, au point où mon petit doigt me dit - s'il savait parler - que je lirai d'autres de ses livres. Je découvrais également "le grand vizir de la nuit" publié pour la première fois en 1981.

Pour ma part j'ai trouvé ce texte beau. Pas uniquement ce qu'il raconte mais le tout. Il y a une tendresse, une fragilité, une poésie.

     L'amour est multiple, il est doux, jaloux, possessif, passionnel, beau, entier. Il commande les hommes et les femmes, les élève, les rassure, leur donne vie ou tue. On en oublie les genres, les étiquettes. Il n'y a pas de relations homosexuels, ni hétérosexelles, il y a l'amour et le désir entre deux êtres humains.

     Et pourtant, le personnage de Djafar est plus complexe. Il se lance corps et âme dans ses passions. Au point de se perdre, de ne plus savoir qui il est, de penser que son corps ne lui appartient plus, qu'il est à tous ses amants.

Un très beau livre qui nous fait voyager dans l'Empire abbasside.

Marion

Publié dans Historique

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M
Elle écrit très bien en effet ! Cela fait longtemps que je ne l'ai pas lu...Merci pour ce titre que je ne connais pas.
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M
Mais de rien. Tu m'en conseilles un autre de cette auteure ?