Aurélien d’Aragon (1972)

Publié le par Marion L.

Aurélien d’Aragon (1972)

Visite d'un classique de la littérature.

     C’est l’histoire d’un homme, Aurélien, mais pas seulement, celle d’une histoire d’amour, celle d’une société à un moment donné. Aurélien a offert sa jeunesse à la guerre (la première guerre mondiale.) Il a beaucoup de mal à reprendre une vie dans le civil. De plus, il n’a pas besoin de travailler, vivant des rentes d’une propriété. Alors il sort, connait des femmes, vit sans vraiment vivre. Puis, l’un de ses anciens camarades de guerre lui présente sa cousine, Bérénice. Au début Aurélien la trouve laide mais dit le contraire à son ami, Barbentane. Le cousin joue alors l’entremetteur malgré l’indifférence d’Aurélien pour cette femme. Tous pensent qu’il l’aime. A tel point qu’il se met vraiment à l’aimer (découvre-t-il ses charmes ? Ou est-il poussé par les autres ?) Elle devient alors comme un rêve, un fantasme, car jamais elle ne se donne à lui. Et ce n’est même pas à cause de son mari qu’elle ne le fait pas, mais pour entretenir ce rêve.

     En parallèle nous découvrons d’autres personnages qui évoluent dans une époque donnée, celle d’entre guerre. La guerre est finie, ils sont vainqueurs et insouciants, la vie reprend, sans peur d’une prochaine guerre qu’on n’attend pas.

     A travers Aurélien ce n’est pas la classe ouvrière que l’on voit, mais la bourgeoisie, les artistes, l’apparition de nouvelles pensées (notamment quelques droits supplémentaires à la femme qui a droit au plaisir charnel comme l’homme, sans que ce soit dégradant…) Zamora parle de ses œuvres, Picasso est là, comme Monet. Rose représente le théâtre, Paul Denis la poésie et la musique…

     Tout gravite autour d’Aurélien et de Bérénice. Cette femme mariée à un homme qui a perdu un bras, vient de la Province et découvre Paris, aime Paris, et ce prend d’amour pour ce garçon taciturne qu’est Aurélien. Un amour qui n’a rien de facile car tout semble s’y opposer même si au début il n’aurait pas existé sans Barbentane. Entre les jaloux, les coups du sort, la morale, l’incompréhension des deux amoureux l’un de l’autre – après tout ils se connaissent peu - , tout les sépare. Même eux se mettent des difficultés, et notamment Bérénice.

     C’est un amour qui doit rester pur, qui perdrait quelque chose s’il était consommé. Il doit rester dans l’esprit sans la corruption de la chair. Et ce, même si cela les rend malheureux. L’auteur les compare à Roméo et Juliette. Or nous y sommes un peu, il n’y a pas d’amour heureux, la vie les sépare malgré leur grande passion.

      Louis Aragon l’a écrit alors que sa femme Elsa écrivait le cheval blanc. Aurélien c’est une réponse à ce livre, sa version, son œuvre à lui. Elle s'intègre dans une série de livre qui se veut un reflet de la réalité.

     Demeure une lecture compliquée surtout que la formulation des phrases n’est pas la même qu’aujourd’hui. Et pourtant on se plait à lire le livre, à voir dérouler la vie d’Aurélien, et cette catastrophe amoureuse qui aurait pu être évitée.

     Pas de développement scolaire dans cet article. Juste un petit extrait pour illustrer le style très oral de l'écriture, un peu hachuré, coupé et qui se prête très bien à une lecture à voix haute.

« Il n’aimait pas son père, si pareil à Armandire que c’en était gênant. Avec ses longues moustaches et son monocle. Le jeune Aurélien était au régiment, à Commercy, quand il apprit le dénouement brutal de la longue histoire de ses parents, tués dans un accident d’automobile, tous les deux, sur la route, près d’Avignon. Un accident. Jamais Aurélien ne put se persuader tout à fait qu’il s’agissait vraiment d’un accident. Son père conduisait. La voiture s’était jetée à une allure folle sur un arbre. Il conduisait très bien, son père. Rien n’expliquait cette folie, cette vitesse déréglée, ce saut soudain hors de la voie où personne ne passait. Peut-être la colère, une dispute. » p. 48

Marion (Source image : electre)

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